© François Goudier

La Psychanalyse intégrative se situe à l’articulation des psychanalyses et des psychothérapies existentielles et relationnelles.

Elle se fonde sur une épistémologie de la complexité de l’être humain décrite par Max Pagès qui définit le sujet comme un système de systèmes : corporel, émotionnel, langagier et socio-familial. Elle adopte le modèle du psychisme élaboré par Freud et enrichi par ses successeurs ainsi que les par les apports de Wilhelm Reich.

Elle instaure un dialogue et un rapprochement entre les différentes démarches et privilégie les articulations théoriques et les stratégies thérapeutiques multiples.

La Psychanalyse intégrative répond à la nécessité de tenir compte de l’évolution des troubles, en relation avec les transformations des diverses sociétés contemporaines où ce qu’on appelle les « personnalités limites » (borderline) sont en constante augmentation.

Conscient de ces évolutions, le psychanalyste intégratif combine différents paradigmes herméneutiques pour décoder la part des facteurs psycho-affectifs, des réalités sociologiques, somatiques dans la construction et reconstruction des sujets, et articuler des dispositifs thérapeutiques appropriés (individuel et/ou groupal).

Les trois principes de la Psychanalyse intégrative sont :

  • la reconnaissance et la prise en compte de l’inconscient,
  • la relation dans le transfert
  • la modification de la technique et du cadre selon les problématiques du patient, sa régression et le moment de la cure.

La dimension relationnelle et thérapeutique s’expérimente et se déploie dans le transfert. Philippe Grauer et Yves Lefebvre soulignent que « c’est l’analyse de cette relation transférentielle non plus refoulée mais déplacée donc perceptible, qui pourra alors permettre de rencontrer enfin les véritables pulsions d’origine, non pas intellectuellement mais réactualisées et expérimentées dans le vécu relationnel de la séance ». Elle se déploie aussi dans le processus de la régression (topique, temporelle, formelle, émotionnelle).

Dans la lignée de Ferenczi, Balint, Winnicott, le fondateur de la Psychanalyse intégrative Jean-Michel Fourcade a donné toute son importance dans le processus thérapeutique à la régression et à ses aspects non verbaux (par exemple corporels) et préverbaux (régression à un stade pré-langagier du développement psychique).

Fourcade insiste sur la nécessité d’un travail d’intégration et de maternage corporel et émotionnel d’autant plus nécessaire que les régressions ramènent le patient à des stades archaïques de son développement somato-psychique.

Des aménagements du cadre sont alors nécessaires : interprétation dans le transfert et non pas seulement du transfert, recours avisé à des exercices psycho‑corporels visant à la décharge émotionnelle et à la décontraction des tensions somatiques, fréquence et durée des séances. Le moteur n’est plus la frustration comme dans la psychanalyse classique mais la gratification réelle et symbolique.

Dans la pratique…

Dans la pratique, on peut passer de la neutralité bienveillante avec une écoute « flottante » à la levée temporaire de la règle d’abstinence* pour répondre aux besoins primaires du patient, comme une « mère suffisamment bonne » (Winnicott) le ferait. « C’est une relation où prédomine la mutualité et non la réciprocité qui, elle, caractérise la symbiose » comme l’énonce Fourcade. La prise en compte du contre-transfert – ce qui présuppose que le praticien s’est livré à un travail approfondi sur lui-même – permet d’intervenir en réponse ou en résonance avec le transfert du patient et d’avoir recours à la technique active (Winnicott, Searles, Mahler) en réponse aux besoins du patient.

Le travail du psychanalyste intégratif peut ainsi passer, selon le moment de la cure et la régression du patient, de l’interprétation du transfert à la réparation du lien primaire défaillant à l’origine de la souffrance du patient. Dans ce processus thérapeutique alliant régression et progression, le patient devient le sujet de sa propre histoire.

* Règle de la pratique analytique selon laquelle la cure doit être menée de telle façon que le patient trouve le moins possible de satisfactions substitutives à ses symptômes. Il implique pour l’analyste le précepte de se refuser à satisfaire les demandes du patient et à remplir effectivement les rôles que celui-ci tend à lui imposer. La règle d’abstinence peut, en certains cas et en certains moments de la cure, se spécifier dans des consignes concernant des comportements répétitifs du sujet qui entravent le travail de remémoration et d’élaboration.

Pour en savoir plus, quelques livres…